° Jugez-vous que les Pensées de Pascal, constituent « un amas confus, sans ordre, sans suite, et qui ne peut servir à rien » ?
Etienne Périer, neveu de Pascal, est l’auteur de la préface de l’édition de Port Royal, la première édition des Pensées publiée après la mort de Pascal en 1670. En découvrant les Pensées, dans l’ordre où elles ont été écrites, les amis de Pascal ont été profondément déçus, jugeant qu’elles constituaient « un amas confus, sans ordre, sans suite, et qui ne pouvait servir à rien ». Si c’est le cas, pourquoi les critiques contemporains s’évertuent-ils à publier les Pensées en suivant précisément ce premier manuscrit ? Derrière ce désordre et cette confusion, quel projet se dessine ? Nous analyserons d’abord les caractéristiques du recueil qui donnent l’impression d’un amas confus et sans ordre, puis nous verrons qu’en réalité, il y a bien une suite et un ordre, et que dans l’état où on les a trouvées, les Pensées sont loin d’être inutiles.
Si Etienne Périer se désole devant le manuscrit de Pascal, c’est qu’il s’attendait, comme ses contemporains, à lire une œuvre achevée, une apologie construite et entièrement rédigée. Or, les liasses sont bien loin de satisfaire à cette exigence en raison de leur discontinuité.
En effet, les Pensées se présentaient sous la forme d’un « amas », des petits tas de notes sur des papiers découpés et reliés par des ficelles. Les éditions actuelles tentent de créer un minimum d’ordre en affectant à chaque unité un numéro.
Mais la lecture linéaire des fragments ainsi numérotés ne peut que confirmer l’impression d’Etienne Périer sur l’absence de « suite ». Lorsqu’on lit par exemple dans la liasse « Vanité » les fragments 16, 17 et 18,
« 751 un bout de capuchon arme 25000 moines. » « Il a quatre laquais. » « Il demeure au delà de l'eau. », l’on reste perplexe : que signifie « 751 » ? Qui a « quatre laquais » ? Est-ce le même qui « demeure au-delà de l’eau ? ». Les éditeurs de Port-Royal se sont ingéniés à modifier le texte pour le rendre plus accessible, le fragment 16 et le fragment 18 ont été supprimés, « il a quatre laquais » a été interprété dans le sens de la « Raison des effets ».
Enfin, le texte ne présente pas de cohérence dans son énonciation. Tantôt Pascal semble reproduire les propos d’un locuteur précis, comme lorsqu’il écrit « Pourquoi me tuez vous à votre avantage ? Je n’ai point d’armes », tantôt, il semble écrire de simples notes pour lui-même, comme dans le fragment 42 : « vanité. La cause et les effets de l’amour. Cléopâtre. » Dans cette pensée, l’absence de verbe donne le sentiment que le propos n’est pas achevé.
Cependant, un lecteur attentif et persévérant ne peut en rester au jugement d’Etienne Périer. Les Pensées sont bien organisées selon un ordre particulier.
Le premier indice de cet ordre est le classement des liasses. De « Vanité » à « Divertissement », les fragments sont classés par thèmes, et à l’intérieur de chaque liasse, plusieurs pensées présentent un titre qui permet de les relier au thème central de chaque regroupement. Ainsi, dans « Raison des effets », les fragments 82, 83, 84, 85, 86, 89, 90, et 92 portent le titre « Raison des effets ». D’autres ont pour titre « opinions du peuple saines » et son bien en rapport avec les idées développées dans la liasse.
Second élément important, la première liasse, intitulée « Ordre » présente justement des projets d’organisation. C’est notamment le cas du fragment 4 qui expose deux parties : « 1re partie. Misère de l'homme sans Dieu. 2e partie. Félicité de l'homme avec Dieu. » Or force est de constater que dans les liasses que nous étudions, Pascal développe bien l’idée que l’homme, soumis aux vanités, est un être « misérable ». Cependant, Pascal ne semblais pas avoir encore déterminé quelle serait la forme définitive de son texte, puisqu’il parle de « lettre », et aussi d’« ordre par dialogues ». D’autres fragments de la partie « Raison des effets » reviennent sur cet ordre. Dans le fragment 86, Pascal écrit « Nous avons donc montré que l’homme est vain par l’estime qu’il fait des choses qui ne sont point essentielles. […] Nous avons montré ensuite que toutes ces opinions sont très saines, […] Mais il faut détruire maintenant cette dernière proposition et montrer qu’il demeure toujours vrai que le peuple est vain, quoique ces opinions soient saines, parce qu’il n’en sent pas la vérité où elle est et que la mettant où elle n’est pas, ses opinions sont toujours très fausses et très mal saines. » Cette citation révèle la cohérence de la réflexion de Pascal. En effet, la liasse « Vanité » montre bien que « l’homme est vain » alors que la liasse « Raison des effets » défend l’idée que les opinions du peuple sont « saines », mais il faut aller plus loin dans la lecture pour connaître la « vérité ».
Enfin, les fragments les plus longs, et les mieux rédigés apparaissent souvent à la fin de chaque liasse qu’ils permettent de comprendre. C’est le cas du fragment 71, qui donne l’explication de la « Misère » : « L’ecclésiaste montre que l’homme sans Dieu est dans l’ignorance de tout et dans un malheur inévitable, car c’est être malheureux que de vouloir et ne pouvoir. Or il veut être heureux et assuré de quelque vérité. Et cependant il ne peut ni savoir ni ne désirer point de savoir. Il ne peut même douter. » L’ensemble de la liasse prend tout son sens à la lecture de cette citation.
Dans l’état où nous les lisons, les Pensées ne sont donc pas inutiles. Si le désordre apparent est apparu comme un défaut majeur à Etienne Périer, il a constitué un des aspects les plus fascinants de l’ouvrage pour les lecteurs qui ont suivi. Car cet « amas » sert à quelque chose : il suscite la réflexion.
Le caractère inachevé et fragmentaire de l’œuvre a une première conséquence décisive sur la lecture : il n’est pas nécessaire de commencer par le début pour comprendre la suite. L’on peut ouvrir l’ouvrage où l’on veut et méditer sur un fragment, comme s’il s’agissait d’une maxime isolée. Le titre trouvé par Etienne Périer, « Pensées sur la religion » reflète bien cette variété de l’œuvre qui n’est pas formée d’un discours, mais d’un ensemble de discours variés, souvent repris et augmentés au fil des liasses. Ainsi, les images du talon de soulier, les laquais, ou encore les mouches sont évoquées à plusieurs reprises.
De plus, l’absence de lien entre des fragments qui se succèdent crée une énigme, et l’on est souvent amener à chercher le lien qui manque, ce qui amène à réfléchir sur la logique de Pascal. Ainsi, l’on se rend compte que les fragments 16, 17 et 18 constituent pour Pascal des exemples de la vanité du monde : une guerre au sein de l’église pour la forme des capuchons des moines, le respect accordé à un homme en fonction du nombre de ses serviteurs, le droit de tuer quelqu’un parce qu’il est étranger. Dans ce cas, c’est le thème de la liasse qui sert de lien.
Le caractère inachevé de l’ouvrage permet aussi de suivre l’auteur au travail : l’on constate que Pascal lit Montaigne, souvent cité, qu’il pense à son contemporain Descartes, qu’il reprend dans une partie en la développant une thèse exposée dans une autre. Somme toute, ce manuscrit est plus vivant qu’une œuvre achevée, car il laisse au lecteur une grande liberté d’interprétation.
La critique d’Etienne Périer reflète donc ce qu’une première lecture donne à voir des Pensées, cependant, en respectant ce « désordre » apparent, les éditeurs contemporains offrent au lecteur la possibilité de reconstituer le raisonnement de Pascal tout en suivant les divers états de sa réflexion. C’est là sans doute l’originalité de cette œuvre : elle est ouverte.
19.03.09
Séance 1
Les Pensées de Pascal
ND:
ce qui est en vert sont des questions pour s'entraîner et que l'on peut rendre à notre prof.
ce qui est en gris ne fait pas partie de notre tranche de lecture, ce n'est donc pas au programme, mais sert simplement à illustrer, donner des exples et de la culture générale en plus.
Présentation de l'oeuvre: Pensées, de Pascal n'est pas un livre qu'il a écrit, car il est mort avant de l'avoir fini.
Sa famille, témoin de cela, a voulu réunir tout ses écrits et les a rassemblé en liasses dans une même oeuvre. D'où le nom "pensées". Son vrai titre aurait du être "l'apologie de la religion chrétienne".
Séance 1
=> Introduction au cours
-Titre
- Editions
- La pensée de Pascal (=> annexe: le jansénisme)
1) Le titre
Lorsqu'on ouvre l'oeuvre sans connaissance, on peut être surpris par l'hétérogénéité des fragments dont certains ne sont même pas rédigés.
En cela les deux premières phrases de la préface de Guern sont significatives: "Les pensées sont le papier d'un mort. Non pas une oeuvre posthume". Alors qu'on croit ouvrir une oeuvre, on aborde une collection de fragments: si Pascal avait pu finir son projet, l'oeuvre eu été différente, mais on ne saura jamais ce qu'aurait été
L'Apologie de la religion chrétienne. La mort a donc empêché Pascal d'écrire cet ouvrage mais elle a donné naissance à une autre oeuvre = celle que nous avons:
Les Pensées.
(Editions)
A sa mort, sa famille découvre environ 800 papiers (fragments) qu'elle considère sans ordre:
- un comité d'ordre de lecture se constitue, relie les fragments et se permet d'en achever certains: c'est l'édition de Port Royal éditée en 1670 et qu'ils appellent
Pensées sur la religion et sur qql autres sujets, cette édition est celle de référence jusqu'en 1844.
- Au 19em s., on reprend les brouillons de Pascal et deux nouvelles éditions apparaissent: Havet, et Brunschvicg = le texte est vraiment fidèle au texte de Pascal, en revenche le classement n'est pas le bon.
- milieu du 2àem s., des spécialistes se sont penchés sur les écrits de la famille de Pascal notamment son neveu, Etienne Perrier, où ils apprennent que tout les fragments étaient "tous ensemble enfilés en diverses liasses; ces chercheurs ont trouvé deux copies qui signalaient l'existence et le résultat de ce travail en liasses: il y avait 60 dossiers dont 27 étaient des liasses titrées accompagnées d'une table des matières qui indiquait l'ordre dans lequel on les avait découvertes.
=> preuve que Pascal avait classé ses notes.
Edition objective: Sellier et Le Guern.
Le titre (suite)
a) L'Apologie de la religion chrétienne
définition:
apologie: discours ou écrit qui a pour objet de défendre, justifier souvent en faisant un éloge d'une personne, d'une cause contre les attaques publiques.
voir fragment 10 car justification de l'apologie d'une cause. Ce fragment permet de désigner les destinataires de son apologie càd les libertins, les athées soit tous ceux qui doivent croire au christiannisme
Si les pensées veulent montrer que "L'homme, sans Dieu, est misérable" et que l'homme avec Dieu est heureux, Pascal ne peut pas changer l'homme, la seule chose qu'il puisse faire, c'est montrer son étude de la nature humaine, ainsi très souvent les fragments relèveront de la démonstration.
b) Les Pensées
vient du verbe "penser", signifie, au 10em s., réflechir, concentrer son esprit sur qql chose.
le nom "pensée" est apparu au 12em s., ce qu'on pense
au 17em s., prend un sens artistique
et en 1669, prend le sens de courte réflexion ayant un sens profond et exprimé sous forme littéraire.
C'est l'oeuvre de Pascal qui a permit de donner ce nouveau sens, ce sens qui à son tour lui confère une valeur littéraire.
Lecture du fragment 186
Exo: donner l'explication de ce fragm.
(+ fragm. 527, 636, 638)
ces 4 fragm. sont un exple de répétition au service de la tonalité didactique
"l'homme est un roseau pensant" (186) => "penser" vu positivement
"Lhomme est visiblement fait pour penser" (527) => "penser" vu positivement
(636) => "penser" vu comme une idée sotte, dépressiative et relative. il y a donc une évolution de sa pensée, de son cheminement.
Qu'est-ce que Pascal pense de la pensée?